« Can I take a picture of your driver license to send it to my friends, just in case? »

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Becky • Anton, Co • 3 août 2016

Après une journée contre le vent, passé le hameau de « Last Chance » qui porte bien son nom, j’ai renoncé et fait du stop. Becky est la première à s’arrêter. Après m’avoir questionné sur ma direction, elle demande mon permis de conduire pour le photographier et l’envoyer à ses proches, au cas où il lui arriverait quelque chose (sous entendu si j’étais un criminel).

Voilà bien un syndrome américain que je constate au cours de mon voyage : beaucoup de leurs comportements sont liés à des peurs, alors qu’honnêtement, il ne se passe pas grand chose dans ces régions du centre des USA.

Une fois en route, elle sort son téléphone et appelle le prêtre de sa paroisse pour lui demander conseil et me trouver un hébergement pour la nuit. Il la dirige alors vers un motel/camping tenu par d’autres paroissiens, la famille Skubal.

Après avoir planté ma tente, et montré mes photos aux 4 enfants de la famille, nous passons à table. Aaron, le père, prend l’initiative de dire la bénédicité. Avec une grande générosité, sa prière tourne autour des souhaits qu’il souhaite voir exaucés pour la suite de mon voyage : moins de vent, de crevaisons et de montées.

La discussion a ensuite vraiment commencé. L’une des premières questions qui m’ait été posée est sur ma foi.

Alors j’ai expliqué qu’en dépit de mon éducation catholique, je ne crois plus en Dieu depuis mon adolescence, que faire correspondre mes convictions, ma vision de la science et Dieu ne fonctionne pas dans mon esprit. Ils paraissent surpris de rencontrer quelqu’un qui ne croit pas en un Dieu quelconque.

Après la religion, il fallait bien que nous parlions un peu politique. Sans appel, Aaron a éliminé l’option Hillary Clinton. Mais il ne semblait pas non plus convaincu par Donald Trump. L’homme ne correspond pas à sa morale religieuse. Ce qui est drôle c’est que l’une de ses filles s’est amusée de ce doute.

Je l’ai senti ennuyé car il devra voter pour un homme dont il ne partage pas les valeurs. Il aurait souhaité que le candidat Ben Carson, prestigieux neurochirurgien, ultra conservateur et très religieux, créationniste, opposé à l’avortement, critique de l’homosexualité, défendeur du port d’arme soit le candidat républicain. Si sur les idées, il ne s’éloigne pas trop de la ligne contemporaine du parti Républicain, sur le style c’est très loin de Donald Trump.

Aaron est un typique représentant de la droite Chrétienne républicaine, il regrette par exemple que les Dix Commandements de la Bible ne soient plus affichés dans les salles de classe.

L’un des autres thèmes de notre discussion a été le prix des universités. Il critique les Démocrates qui veulent rendre l’enseignement supérieur gratuit. Une année coute en effet jusqu’à 60000 dollars (mais il existe des bourses, des rabais), imaginez avec quelle dette les étudiants entament leur carrière professionnelle. Cela explique d’ailleurs pas mal la propension des américains à peu voyager et à travailler beaucoup, il faut payer ses études. Il défend le système actuel dans lequel chacun investit dans ses études en fonction de ses moyens, et lorsque je lui ai parlé du risque de reproduction sociale, il m’a confié que lorsqu’il était étudiant, il enchaînait quatre jobs pour payer son université en sciences sociales.