à propos

CC BY-SA 4.0

Josef Helie, bandit légal, est photographe. Ses images témoignent de ses émerveillements imprévisibles et d’une sensibilité alerte et ludique sur les formes au sein desquelles il déambule ; volubile, encourageant et confiant pour les humanités qui s’y croisent.

Il est encore plus artiste, avec tout ce que ça comporte comme ambition d’étendre les possibilités de son outil, de repenser sa nature-même, sa fonction et sa destination, son adresse et son partage. Alors il installe, il scelle son image préalablement figée sur un solide carreau, dans le lieu-même de la prise de vue, ainsi volée puis rendue.

La photographie se fait alors véritablement in-situ : ses deux dimensions se déploient dans l’espace, land-art à l’ère de sa reproductibilité technique, instantané sur place, carrés d’art sur monuments historiques, œuvres restituées à leurs contextes de création qui sont leur origine et leur destination. Si tout a commencé rue des Étrangers, il est évident que le personnage n’est pas familier : fugace figure de l’ombre sinueuse et volatile, il incarne son rôle pétri de paradoxes avec une assurance décidée, enfourche sa bicyclette et endosse le costume d’un vandale propre et bienveillant, insaisissable partisan d’un parasitage fertile, d’une perturbation bénéfique.

Le cadrage se décloisonne, propose un angle tout en déployant ses marges, et le passant, qui en baladant ses yeux mérite d’être agréablement surpris, a alors tout loisir de revenir sur les limites de l’image en retrouvant la composition in real life, de terminer le processus créatif d’un sacré profanateur mais gentil saboteur. La démarche est pensée globalement mais agit localement, la présence inattendue d’un objet simple mais unique dans son lieu consacré redonne, à contre-courant de l’époque, son importance à la notion d’hic & nunc, ici et maintenant.

Sans s’imposer, Josef Helie distille discrètement ses enchantements, saupoudre généreusement un trajet quotidien d’une dose de poésie libre d’accès, plaisirs furtifs qu’il veut reproduire loin des écrans superficiellement tactiles et des white cubes dédiés, pour inviter un public indéterminé et hasardeux à regarder le monde comme les plus belles photos qu’il reste à prendre et à partager, à constater que c’est avec de l’art que la vie devient plus intéressante que l’art*.

Arnaud Coutellec

 

* Robert Filliou