Reportage photo vélo : comment prendre le mauvais train, faire une grosse chute de vélo et tout de même passer une journée vélo de folie en Picardie
Aussi intitulée, reportage photo vélo Vivons Vélo à Chaulnes.
Arrivé à Paris la veille, je devais prendre le train tôt le matin depuis la Gare du Nord vers Amiens où Daniel, le Président du Cyclo Club Chaulnois devait venir me chercher. AG2R et son programme Vivons vélo m’avaient envoyé en Picardie pour y faire un reportage photo vélo sur une sortie organisée par le club local. Mais cela ne s’est pas tout à fait passé comme prévu.
est allé comme prévu dans mon ventre,
en revanche le train n’est pas allé là où il devait !
Villers-Cotterêts je vous divulgâche que ce n’est pas du tout la direction d’Amiens
C’est dans le TER, en entendant l’annonce « gare de Villers-Cotterêts, qu’il m’est venu l’idée de regarder ma localisation sur Google Maps. Et si, comme moi, vous ne connaissez pas bien la géographie du nord de la France, et bien, Villers-Cotterêts je vous divulgâche que ce n’est pas du tout la direction d’Amiens. Paniqué, je suis allé voir la contrôleuse de la SNCF qui m’a très paisiblement annoncé que je n’étais pas le seul dans ce cas et qu’il y avait dû y avoir une erreur d’affichage en gare, tout en m’informant qu’aucun train me permettrait de rejoindre à l’heure Amiens, ou Chaulnes, ma destination finale depuis la prochaine gare, Soissons.
Je fais le point, il faut 4 heures de route à vélo pour rejoindre ma destination alors que je dois y être 2 heures plus tard. J’écarte la solution. Pourquoi pas louer une voiture ? Malheureusement, je n’ai pas mon permis de conduire avec moi, solution écartée aussi. Il ne me reste qu’une seule solution, faire du stop. Je l’avais déjà fait aux USA, ça va le faire ! J’appelle Daniel, et je le rassure : « je me mets en mode Pékin Express », rire au bout du fil.
Je me suis retrouvé aussi sec
la joue gauche freinant ma chute
Arrivé en gare de Soissons, qui se trouve à l’est de la ville, je saute du train, enfourche le vélo et file bon train direction l’ouest vers un rond-point qui me semble être une bonne porte de départ pour Chaulnes.
Et c’est là que la situation a clairement légèrement empiré.
Ouf c’est pas aujourd’hui
que je suis mort
Sur le moment, une seule pensée, j’ai pas mal, mais je vais me faire rouler dessus. Je me relève instantanément et constate que les voitures sont arrêtées derrière moi. Ouf. C’est pas aujourd’hui que je suis mort.
Je vois sortir de la voiture un monsieur, très calme, qui me demande si je vais bien. Ma foi oui. Choqué, mais entier, heureux surtout de m’en sortir à si peu de frais. Il demande à son épouse de s’avancer et de se garer le long de la route. Ils continuent à me demander de mes nouvelles et, dans l’adrénaline de l’instant, profitant de cette voiture arrêtée alors que je n’ai pas encore levé le pouce, je leur expose ma situation en leur demandant s’ils peuvent m’aider en m’emmenant à Chaulnes. Je vois la dame, étonnée, mais qui ne refuse pas d’emblée. Je leur explique tout de même que c’est à 80 km environ. Elle se demande comment transporter le vélo, « facile dans le coffre » lui réponds-je. Problème, ils ont leurs courses à la place mon vélo. Je les vois se concerter et ils me font cette proposition extraordinaire qui va remettre ma journée en dans le droit chemin, « nous allons déposer nos affaires et nous revenons dans 10 mn ». Et je les regarde partir, 95% confiant, 5% circonspect, 5% encore sous le choc de l’accident.
Et je pèse mes mots, combien de personnes auraient accepté en un clin d’œil de m’emmener ? Combien seraient revenus, tenant leur promesse ? Mais surtout, combien auraient fait un détour par l’armoire à pharmacie pour prendre des cotons, du désinfectant, des pansements et du paracétamol ? Peu, très peu. Et ils se sont trouvés sur mon chemin.
Ils sont originaires de Martinique et de Guadeloupe, installés en région parisienne depuis 30 ans. Nous parlons de leur travail de fonctionnaires, de leurs enfants, de mes voyages, de religion, du racisme qu’ils ont vécu à leur arrivée en métropole. Cela me rend triste, comment des gens ont pu avoir un sentiment si opposé au mien à leur égard, comment ne pas voir l’humanité universelle qui nous relie ?
Et puis une heure plus tard, nous voilà déjà arrivés à Chaulnes. Présentations rapides avec Daniel, qui est déjà là à m’attendre, selfie souvenir et déjà Sylvie et Will sont repartis. Était-ce un mirage ? Non, les douleurs dans la hanche, l’épaule et ma joue balafrée témoignent de la réalité de la situation, je suis arrivé à bon port, avec une nouvelle histoire à raconter.
J’avais déjà eu deux jours avant affaire à Daniel au téléphone et j’avais bien hâte de le rencontrer. Parce que dans le genre sympa, il semblait être champion hors catégorie. Mon impression était la bonne. Il m’a présenté son vélo hors du commun, un tricycle pour accommoder son pied qui ne fonctionne plus aussi bien qu’avant.
Taboulé et pâté fini, il était temps de remonter sur le vélo. Seul hic, comment passer la jambe par-dessus la selle alors que ma hanche est à moitié bloquée depuis que mon corps s’est refroidi ? Je cherche encore, mais c’est passé, grimace en prime. Il était l’heure de prendre la direction de la place du village pour rejoindre nos camarades de la sortie Vivons Vélo.
Merci Vivons Vélo, et merci AG2R !
De retour chez Daniel, il m’a partagé le livre de son dernier voyage à vélo, un tour de la Somme en 5 jours sous la canicule de l’été 2022. Une fois la dernière page tournée, il était déjà temps de reprendre le train, le bon cette fois-ci et de retourner à la vie normale, hors de cette journée absolument réjouissante.